Les courants littéraires : la littérature de l’Absurde

Introduction

En poursuivant notre escapade temporelle à travers les différents courants littéraires, nous vous décortiquons cette fois-ci les mécanismes de la littérature de l’Absurde.

Quelles sont les racines de ce courant ? Et sous quelles formes s’est-il déployé ?

Naissance du courant

Héritière du Surréalisme, la littérature de l’Absurde apparaît au milieu du XXe siècle, entre 1930 et 1970. Dans un contexte marqué par les guerres et le totalitarisme, un sentiment d’impuissance et de perte de sens habite les écrivains. Ce traumatisme est à l’origine de ce qu’on appelle la littérature de l’Absurde. L’adjectif, signifiant littéralement « ce qui n’a pas de sens » reflète la crise existentielle que traverse la littérature.

Les fondements

Ce courant abrite plusieurs thématiques et sources de préoccupations contemporaines au XXe siècle :

  • L’existentialisme : Courant philosophique et littéraire fondé et développé en premier lieu par Jean-Paul Sartre, l’existentialisme interroge la condition humaine et la liberté qu’elle offre. Dans une existence où la mort est inévitable, l’essence même de l’existence apparaît comme absurde d’après les adeptes de ce courant. Pour Sartre, l’Homme ne se définit qu’à travers ses actes. Dans cette perspective, il ne serait donc possible de le faire qu’à la fin de l’existence. Pour ces raisons, l’existentialisme s’oppose à l’essentialisme.
  • L’engagement : Au moment de la Seconde Guerre mondiale, l’engagement est à son paroxysme. Aux yeux des écrivains, écrire devient un acte de résistance, comme le montre le poète surréaliste René Char par exemple. Ses Feuillets d’Hypnos, écrits alors qu’il était maquisard entre 1943 et 1944. Ils étaient rassemblés à l’origine dans un carnet qui tenait autant du recueil de poèmes que du journal d’intendance. Dans un monde en perte de sens, l’écriture devient un moyen de se poser des questions.
  • Un quotidien illusoire : En parallèle d’un sentiment de responsabilité individuel et collectif, notamment envers les récents événements traumatisants, la vie quotidienne perd elle aussi son sens. Elle ne serait qu’une illusion dont on se satisfait, sans conscience de son caractère chimérique. Sartre dépeint ce malaise dans son roman La Nausée, dans lequel le personnage principal expérimente « la nausée » en observant un marronnier. De même, les œuvres d’Albert Camus appartenant au cycle de l’Absurde présentent des personnages emprisonnés dans un carcan quotidien auquel ils ne parviennent pas à échapper.
  • La révolte : Dans ce monde absurde, la révolte semble être la seule issue pour l’Homme en quête de sens. C’est pourquoi après le cycle de l’Absurde, Camus entame un cycle de la Révolte. La pièce de théâtre historique Les Justes, mettant en scèneun groupe de socialistes projetant l’assassinat d’un grand-duc durant la révolution russe de 1905, appartient à ce cycle et incarne les réflexions philosophiques de son auteur.

Si la littérature de l’Absurde s’épanouit dans une pluralité de genres, le théâtre reste le terrain privilégié aux expérimentations absurdes, en partie grâce au contact direct qu’il permet entre le public et le travail sur le langage dans son absurdité. L’objectif est de rompre avec les genres classiques où les intrigues cohérentes et les structures formatées ne sont pas en adéquation avec le message visé.

Œuvres et auteurs absurdes

  • Samuel Beckett : En attendant Godot (pièce de théâtre). Dans cette pièce, les dialogues sont décousus, incompréhensibles, remplacés par moments par de longs silences, comme si la parole était elle-même devenue inutile. Le sujet est lui aussi mystérieux, on ignore qui est ce fameux « Godot » qu’attendent résolument les personnages ni la raison de cette attente.
  • Albert Camus : L’Étranger (roman), Le Mythe de Sisyphe (essai), Caligula (pièce de théâtre), Le Malentendu (pièce de théâtre). Figure majeure de la littérature de l’Absurde, Albert Camus décrit des personnages qui ont conscience de l’absurdité de leur existence, et c’est la raison pour laquelle leurs destins sont tragiques.
  • Eugène Ionesco : La Cantatrice chauve (pièce de théâtre), Rhinocéros (pièce de théâtre). Avec une dimension comique Ionesco traite de thématiques qui reflètent pourtant la détresse de son époque. La « rhinocérite », épidémie qu’il imagine pour Rhinocéros n’est qu’une métaphore pour évoquer la montée du totalitarisme par exemple. Cette détresse est d’autant plus angoissante qu’elle semble sans fin : La Cantatrice chauve s’achève sur les répliques du départ, comme une boucle inlassable.

Crédit image : pixabay

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